Rencontre avec Caroline Bouyer, artiste graveure installée dans le quartier parisien de Ménilmontant, à l’occasion de la sortie du papier peint SOURCES, une série limitée qui porte la double signature Le Monde Sauvage x Caroline Bouyer.
 

Caroline Bouyer x LMS, la collab !

 

 

Caroline, pouvez-vous vous présenter ?

Je m’appelle Caroline Bouyer, je suis artiste plasticienne, je pratique le dessin et la gravure. Je partage mon temps entre mon activité artistique et l’enseignement de ma pratique dans le cadre du parcours « Gravure – images imprimées » du DN Made (diplôme national des métiers d’art et du design) à l’école Estienne à Paris.

Passion gravure

J’ai découvert la gravure très jeune, à 15 ans, en intégrant une formation des diplômes des métiers d’art à l’école Estienne. J’y ai effectué mes cinq années d’études puis de nombreuses années à me former auprès d’artistes et d’imprimeurs. La gravure taille douce sur cuivre est une technique ancienne qui est apparue au XVe siècle en Occident. De la maîtrise des gestes à la chimie par l’utilisation des acides pour l’eau forte, ainsi que tous les champs des procédés d’impression, elle mobilise de multiples savoir-faire. C’est un espace de création infini qui rend ce métier si passionnant.

 
 

Dans mes recherches actuelles, je mélange dessin et gravure. Au commencement, je dessine des croquis dans la nature sur des carnets ; c’est la base de mon inspiration pour créer de nouveaux paysages imaginaires que je grave ensuite sur des plaques de cuivre pour les imprimer sur des papiers qui serviront de support à de nouveaux dessins. Je cherche à réaliser une alchimie en tentant de mêler la subtilité des procédés de gravure, la fluidité du dessin par le trait et les lavis à l’encre et la matérialité des supports que j’utilise (papier Japon ou chiffon et tissus).

Ménilmontant, la montagne de Paris

Je me suis installée dans le quartier de Ménilmontant au début des années 1990 ; j’y ai ensuite ouvert mon atelier en 2007. Même si je n’y vis plus, c’est un quartier auquel je reste attachée pour son authenticité et sa diversité culturelle. C’est un endroit où les artistes sont venus s’installer il y a plusieurs décennies et ont lutté pour conserver leur espace de création malgré la pression immobilière, comme en témoignent chaque année les portes ouvertes des ateliers de Belleville et de Ménilmontant. Les hauteurs de la butte apportent aussi une atmosphère, un état d’esprit particulier et des points de vue imprenables sur Paris.

De l’urbain au végétal

J’ai longtemps traité des représentations urbaines essentiellement en gravure pour aborder les thèmes de la mémoire et des villes et industries en mutation. Lorsque j’ai emménagé dans mon nouveau domicile au Pré-Saint-Gervais en 2019, j’y ai installé un atelier de dessin où je développe de nouvelles recherches. C’est un glissement d’une représentation de paysages urbains vers des paysages plus oniriques, mais il est finalement toujours question de territoires.
 

Une histoire de transmission

J’ai commencé à transmettre mon métier de graveur en 1998 par le biais des formations professionnelles du GRETA à l’école Estienne, puis en 2001 en formation initiale auprès des étudiants de l’école. J’enseigne et je coordonne le parcours en trois ans « Gravure – images imprimées » du DN Made. L’enseignement, les projets menés en équipe, le suivi des étudiants, les partenariats extérieurs sont des enjeux qui permettent de toujours se questionner et d’évoluer, d’élargir un espace de création qui me passionne et me nourrit.

Rencontre inspirante

Béatrice et moi nous sommes rencontrées à l’atelier où elle est venue acquérir un recueil d’estampes des 38 gravures que j’ai réalisées sur les vues du périphérique parisien. Le feeling est tout de suite passé entre nous. Je lui ai parlé de mon rêve de créer un jour un papier peint. Béatrice a saisi la balle au bond et la collaboration est née comme ça, comme une évidence.

Édition limitée

Pour transposer l’univers de mes dessins et les adapter aux procédés de fabrication des papiers peints du Monde Sauvage, il a fallu que je crée un motif très simplifié prenant en compte les particularités de la technique indienne d’impression en batik. J’ai dû effectuer de nombreuses recherches pour comprendre comment s’assemblent les pleins et les vides du motif dans sa répétition et pour la première fois sans en gérer la fabrication. Nous avons procédé à de multiples essais. Ce papier peint a été une aventure innovante pour nous tous et, n’arrivant pas à faire un choix entre les propositions finales, nous avons finalement décidé d’éditer deux versions du motif « Sources » dans les teintes « Marais » et « Ménilmontant » en édition limitée. Ces noms évoquent les ruisseaux qui provenaient des hauteurs de Paris – Ménilmontant notamment – et se déversaient pour rejoindre la Seine. 

 

Sources

Nous sommes très vite tombées d’accord sur le nom à donner au motif car je voulais évoquer la sensation de l’écoulement d’une rivière à travers les espaces blancs non imprimés du papier. Le mot « sources » renvoie également à la symbolique des références qui nourrissent mon travail.

Votre projet de rêve ?

J’ai beaucoup apprécié ce projet et la qualité de cette collaboration ; je recommencerai avec plaisir un partenariat comme celui-là, il y a de nombreux champs des possibles à découvrir.
Pour la suite de mes projets je souhaite continuer à explorer les mélanges de techniques, la manipulation des papiers japonais par les procédés ancestraux ura-uchi de marouflage et également les impressions et dessins sur tissus que j’ai expérimentés cette année. Donc pas de projet précis mais le désir de continuer mes études autour du dessin, de la gravure et de l’impression. Au bout de 35 ans de pratique de ce métier, je peux saisir l’immensité des possibilités créatives ; mon rêve serait d’avoir le temps de poursuivre toujours plus loin mes recherches.
 
 

☞ Les coulisses de la collab ♡

 

 

Atelier Caroline Bouyer - 70 rue de Ménilmontant Paris XXe
@carolinebouyer.gravure_dessin
www.carolinebouyer.fr
📸 Aurélie Deglane @wonderlandphotographie