comment adapter les préceptes de pros chez vous ?
la gentillesse de partager leur vision de la décoration.
Avec générosité, elles vous livrent leurs choix assumés
et partagent tips et conseils inspirants.
Marianne Evennou
Marianne, pouvez-vous vous présenter ?
Je rénove des intérieurs depuis toujours. J’ai commencé par mes maisons puis celles de mes amis pour finir par élargir le cercle. La presse a, depuis le début, été au rendez-vous pour se faire l’écho de mon travail et m’aider à prendre mon envol.
Je n’ai jamais vraiment cherché à faire ce métier.
Il a eu la gentillesse de venir à moi !
Je suis à la frontière de l’architecture et de la décoration : je restructure et j’habille les intérieurs un peu comme un couturier fait son travail. J’ai mon style et je ne fais aucune concession mais je l’adapte à mon client pour lui faire un intérieur sur mesure.
Le bon goût, vous en pensez quoi ?
selon les tribus d’appartenance.
C’est un cliché souvent hérité d’un passé conservateur,
le contraire de la créativité et de la liberté.
Votre bucklet list ?
- Dénicher un jour la maison de mes rêves sans avoir à tout casser pour tout refaire. Mais c’est probablement une utopie !
- Trouver le temps d'écrire un livre dédié aux intérieurs.
-
Faire un break pour prendre le temps de vivre dans des pays différents et découvrir l’artisanat local.
Si vous étiez un artiste ?
Impossible de n’en être qu’un ! Facteur Cheval et Gaudi pour leur liberté,
Matisse pour ses associations de couleurs et sa gaieté, Poliakoff pour sa subtilité
et la composition de ses aplats de couleurs, Le Corbusier dont j’aime tout particulièrement les fresques, Henri Michaux pour sa poésie, Romain Gary
pour son panache... et tant d’autres que j’aime !
Comment définiriez-vous votre style ?
Je suis toujours sensible au métissage, aussi bien dans le temps que dans l’espace. Cela se traduit dans mes chantiers par un mélange de pièces du passé et contemporaines, de meubles et objets des quatre coins du monde pourvu qu’une sensibilité s’exprime. Il m’importe aussi toujours de lier l’aspect fonctionnel avec un style simple et sans prétention mais non dépourvu de fantaisie. Et de choisir autant que possible des pièces façonnées par la main des artistes.
Je ne compose pas des intérieurs qui servent d’apparat social mais des lieux de vie,
des abris pour mieux se protéger
« des orages du ciel et des orages de la vie », comme sait si bien le dire le philosophe Gaston Bachelard.
Les coussins sur le canapé : combien et comment ?
Beaucoup et aussi mélangés que possible ! J’aime mixer carreaux et rayures. Et s’assurer de la quantité pour fournir des armes aux bagarres délicieuses en famille...
Une entrée qui en jette ?
Les entrées sont toujours très importantes pour moi. Elles sont un sas entre la vie extérieure et la vie intérieure. Entrer chez soi doit immédiatement permettre de se sentir protégé. J’aime y utiliser des couleurs fortes comme le rouge pour marquer ce passage très symbolique. Lorsque l’espace s’y prête, j’ajoute volontiers un panoramique en papier peint, comme une fenêtre intérieure qui invite au voyage, un miroir pour donner de la profondeur, et des moulures pour une pointe de sophistication.
Quels conseils pour l’éclairage ?
Il n’y a jamais assez de lumière dans les intérieurs.
J’opte pour un registre d’éclairage large :
très bien éclairé pour travailler, cuisiner ou lire,
et plus tamisé pour les soirées intimes.
Et je mixe : les plafonniers avec des appliques
et des points lumineux plus diffus.
Papier peint all over ou par touche ?
J’ai tendance à utiliser le papier peint par touche pour réveiller un décor :
en soubassement ou sur la partie supérieure du mur, et pourquoi pas au plafond ?
J’avais fait un projet avec le papier peint de Fornasseti qui représente des nuages
pour le plafond d’une salle à manger.
L’art de détourner ?
Les astuces de Marianne
Aborder un projet
Je passe toujours du temps à rencontrer mes clients avant d’accepter de réaliser un projet de restructuration et d’aménagement. J’ai besoin d’avoir la certitude de ne pas faire fausse route et qu’une complicité se tisse.
Ensuite je découvre les lieux et le vrai travail commence : la restructuration avec une circulation fluide et adaptée au mode de vie des propriétaires est la
première étape. Je tente de ne pas trop secouer les lieux et d’être respectueuse de l’histoire architecturale. Je suis toujours ravie de conserver et de mettre en valeur des éléments de charme tout en adaptant la configuration de l’espace à notre style de vie. Une fois l’organisation idéale trouvée, je m’attaque à l'habillage du squelette de l’appartement : choix des matériaux, des tissus, des couleurs et des meubles.
Comment optimisez-vous les petits espaces ?
Les petits espaces ont pour moi quelque chose de très ludique et proche de la poésie de nos cabanes d’enfance.
Je les appelle mes « cabanes urbaines ».
Le prix du m2 étant devenu extravagant dans plupart des grandes villes, on voit de nouveaux profils occuper ces cabanes urbaines réservées jusqu’à il y a encore quelques années aux étudiants et au personnel de maison. Comment vivre de façon acceptable dans des espaces de 11 à 25 m2 ? En exploitant bien sûr chaque m2, en réfléchissant bien à la façon d’y vivre désormais plus centrée vers l’essentiel, plus soucieuse d’avoir peu mais bien. Ma façon de repousser les murs consiste à transformer ces petits espaces non pas en boîtes à vivre mais en de vrais petits appartements avec une zone délimitée pour chaque occupation grâce à la couleur notamment. Je cloisonne mais je fais attention de ne jamais enfermer l’œil en créant des profondeurs. Et je soigne tous les détails.
Le raffinement n’est heureusement pas que l’apanage des grands.
Meubles sur mesure ou pièces fortes ?
Je fais beaucoup de meubles sur mesure, tout particulièrement les rangements et bibliothèques que je tente d’intégrer au mieux pour les faire oublier. Et j’ajoute quelques pièces fortes chinées et/ou des grands classiques du design mais peu. Les stars de la maison restent pour moi les livres, les œuvres d’art, la musique et les parfums. Ce sont eux qui font vraiment vibrer la maison.
La couleur
Je crois qu’il n’y a pas vraiment de secret pour une gamme harmonieuse. J’aime au contraire l’idée de n’avoir aucune règle. La peinture est pour moi très proche du goût. On sait assez bien définir ce qu’on aime ou non manger et cela n’a rien à voir avec une règle de bon ou mauvais goût. C’est au contraire très instinctif et personnel ; il en va ainsi des couleurs. J’ai parfois des clients qui pensent en couleur. Il suffit de voir leur façon de s’habiller pour comprendre qu’ils ne veulent pas d’un appartement en noir et blanc. J’ai moi aussi mon registre qui me porte vers des couleurs sourdes et douces. J’y trouve une profondeur des sentiments. Mais je suis parfois obligée de sortir de mon registre et c’est toujours une expérience enrichissante.
Peinture & papier peint
La peinture et les papiers peints sont mes meilleurs amis, tout particulièrement lorsque j’ai un budget serré. Ils me permettent de raconter immédiatement une histoire en jouant sur les teintes et les formes des soubassements, des retombées de plafonds.
Il m’arrive souvent de traiter les portes de placard comme des tableaux avec des aplats de couleurs ou de composer une fresque sur un mur. Les rééditions de panoramiques permettent de théâtraliser une entrée ou une pièce qui manque de caractère.
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